Le Maroc contemporain est une terre aux contrastes si forts que les pères et les fils n’ont parfois plus assez de mots et de références communes pour être en mesure de se comprendre. Aujourd’hui, les jeunes se sentent empêtrés dans leurs racines et cherchent à s’en défaire. Il ne jurent que par le pain blanc de la modernité. La coupe est franche. De leur exil, les petits-fils reviennent à tâtons. Ils observent silencieusement, comme les enfants veillent en cachette. Ces photos sont des témoins. Elles pourraient être amenées à rendre justice aux victimes innocentes du changement. Après tout, c’est sur le terreau de ses hommes que l’avenir du Maroc se construit. Un jour, la fée électricité est arrivée. C’était il y a cent ans pour les uns, c’est si récent pour d’autres. Les jeunes ont vite pris le pli. Leurs ainés sont plus embarrassés. Le travail de la terre, le rythme des heures : on ne se dépare pas facilement des valeurs d’une vie. La récolte est ingrate pour ceux qui ont semé avec amour. Pourtant, le pain gris avait une autre saveur. Puisse le temps nous permettre de le redécouvrir.
Foucauld Duchange